Mika Mito Men

Prêt au départ

La pause de navigation a été longue : 5 mois et demi en Europe pendant lesquels « Yo ! » a hiverné dans la marina de Tannowa dans la baie d’Osaka.

1er  Juin. Après un mois et demi de refit, « Yo ! » est prêt à quitter la marina de Mito dans la baie de Nagoya pour une traversée de 4500 nm vers Vancouver. Les enjeux sont de taille : environ 40 jours de navigation le long des 40°N avec forte probabilité de brouillard d’où une contrainte électrique non négligeable, une autonomie obligatoire en nourriture et en eau sur la période et une forte composante de stratégie météo.

 

Venant de Hong Kong, nous étions entrés dans l’Empire du Soleil Levant le 3 juin 2016 par l’archipel d’Okinawa, donc un an au Japon; suffisamment pour en savoir beaucoup et en même temps pas grand-chose sur ce pays qui présente le paradoxe permanent qu’une proposition et son contraire soient autant valides et que la « Japanese way » continue à nous apparaître à la fois ridicule et édifiante de par la réflexion et la maitrise du sujet qu’elle suppose. Mais nous y reviendrons, les longs quarts pouvant être propices à la réflexion.

La traversée du Pacifique Nord est conditionnée par la position de l’anticyclone dont le centre, une zone sans vent qui se balade quelques part au nord-ouest d’Hawaï et concentre tous les déchets plastiques du Pacifique réduits en particules microscopiques – la Chine et les US sont des producteurs ou consommateurs mineurs!-. Cette zone doit être contournée par le nord -la rotation des vents autour des anticyclones s’effectuant dans le sens horaire dans l’hémisphère nord- alors que défilent les dépressions qui naissent au Kamchatka au rythme d’une tous les 5 jours et qui balayent la zone d’ouest en est sans s’arrêter à la ligne de changement de date.

Cette route classique d’acheminement par cargo des produits de Chine vers le US -jusqu’au diktat America First de Donald dont il reste à voir la mise en œuvre- est peu fréquentée par les yachties. Tous ceux qui quittent le Japon par le Nord, choisissent de sauter d’île en île par les Aléoutiennes – Alaska sous l’alibi -fallacieux à notre sens- de rendre visite aux ours, orques, baleines… Plus tropicaux que polaires, nous choisissons la route sud.

 

 

Yo ! en tenue d’hiver, entièrement dégréé, haussières doublées voire triplées dans la marina de Tannowa

 

En prévision de ce long passage, tous les éléments techniques du bateau ont été passés en revue.

Lors du carénage, vérification des éléments submergés, peinture, hélice, dérive, safran. Puis contrôle des éléments propulsifs : moteur (grande vidange, changement du presse étoupe, nettoyage du bac) et voiles avec changement du vit de mulet et des billes des chariots de Grand Voile, changement des roulements à billes de l’enrouleur de génois (3 jours de boulot !) et service des winchs. Resserrage des boulons de Raymond (parce que Raymond barre). Inspection des éléments liés à la production d’énergie : éolienne, dont on a re-réglé les chakras  et échange d’une batterie. Hors sujet, les inénarrables et plaisantes activités plomberie. Pointage exhaustif de tous les éléments liés à la sécurité : contrôle des grab-bags (sacs et containers à emporter lors d’une évacuation), vérification de l’étanchéité, fixation des planchers, fermeture des coffres, calage du BIB (radeau de survie), positionnement de l’EPIRB (balise de détresse), acquisition de balise individuelle AIS accrochée au gilet. Mise en réseau des outils électroniques et protocoles de communication. Révision des procédures d’urgence….

Et ….rangement, rangement, rangement.

 

Le marin ne se nourrit pas uniquement de vent, d’eau fraîche et d’avenantes équipières. Il réclame avec régularité des éléments solides. L’avitaillement se transforme alors en affaire intéressante. Donc reprenons : une navigation de 45 jours estimés que l’on peut découper en une première période de 15 jours où il est possible de conserver des produits frais, puis trente jours d’alimentation sur produits de moyenne conservation, tant qu’il est possible de tenir le frigo et à laquelle on ajoute une période de subsistance de 45 jours -on ne sait jamais (certains ont mis 100 jours pour cette traversée, si, si). Apres moult calculs d’apport moyen de 3000 calories par jour et par personne -3600 pour Gabart, donc on n’est pas trop mal- la liste de courses comprend les items suivants : 12 kg de fruits et légumes (le choix est limité : aubergines, poivrons, concombres, choux, oranges, pommes, pamplemousses, tomates, carottes et patates à l’unité si, si), 3 kg de fromage (au Japon, camembert sous vide, fromage pasteurisé d’Hokkaido, sheddar et kiri), 60 œufs, 10 paquets de café, 250 sachets de thé, 30 paquets de biscuits, 6 litres d’huile d’olive, 5 kg de viandes ou poissons sous forme diverses -la pêche devient vite un élément de stimulation pour agrémenter les mets de la cambuse-, 4 kg de sobas, 4 kg de pâtes, 4 kg de farine, 100 boites de thon, sardines, légumes, fruits… et 40 kg de riz.

 

Sac de 5 kg de riz

 

C’est une chose bien connue au Japon, seul le riz de production japonaise est excellent et c’est donc le seul disponible -celui de Fukushima subventionné atteint des prix défiant toute concurrence-. Pour une dégustation parfaite celui-ci doit être cuit dans un « rice cooker », garant de l’obtention du riz gluant idéal à la confection de sushis. On retrouve le Japonica aux caractéristiques grains ronds dans la plaine du Pô parfaits pour la préparation du risotto.

Ce type de cuisson qui nécessite de rincer 3 à 4 fois le riz, puis de le cuire longtemps à la mode pilaf est inadaptée aux longues navigations. Pour notre objectif, du riz  long grain, Thaï ou Basmati convient bien mieux ; après avoir exploré les diverses boutiques qui proposent pourtant 25 riz différents, nous en avons trouvé… dans le chinatown de Kobé, aïe, aïe, la denrée s’échange à 10€ le kg !

Un premier intermédiaire a trouvé le moyen de nous faire livrer 10 kg de riz thaï (Indica rice en langage vernaculaire) à un prix abordable par Amazon.

Enfin un important négociant en grain de Nagoya, voisin de ponton et membre du très exclusif Yacht Club de Mikawa Mito, s’est un tantinet vexé qu’on ne puisse trouver du riz au Japon… il a promis d’en faire livrer 30 kg avant le départ, de l’Indica Rice selon les désirs de l’équipage ! Chose faite ce jour!!!!

 

 

A l’entrée du Daimon Zaka, le chemin emprunté par les pèlerins du Kumano Kodo vers le temple de Nachi Taisha, 2 cryptomères de 800 ans servent de passeurs. Le couple est nommé Meoto Sugi

 

 

A notre tour de reprendre la longue route, un an, jour pour jour alors…. bye, bye Japan

 

En complément pour les curieux un album photo plus détaillé : https://goo.gl/photos/iLxmtuypNvzDznvZA

Et en vidéo, le marché au gros de thon de Katsuura :    https://youtu.be/b1yf5DqYgZ4

Et un bato qui vole : https://youtu.be/8aAoKEepuSo

 

Stéphanie / Christophe

Mikawa Mito Marina – Nagoya – 3 juin 2017

 

4 thoughts on “Mika Mito Men

  1. Bon vent à Yodyssey pour le Pacifique. D’ici à votre arrivée nous tentons de nous faire une France great again! Sans plastiques…. 😉

  2. Certainement très heureux de reprendre les flots! Bonne traversée et que les vents soient avec vous pour cette nouvelle aventure.
    Bises

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